Plutarque (46-125 de notre ère) est un philosophe platonicien et un auteur grec.

Ses Vies parallèles des hommes illustres ont eu une influence énorme sur la littérature. Qu’il suffise de mentionner que Shakespeare y a puisé les sujets de ses tragédies « romaines » et que l’on retrouve l’influence de Plutarque chez Montaigne ou Corneille.

Plutarque fut traduit en France par Jacques Amyot, au XVIe siècle, d’après un texte conservé au Vatican (Jacques Amyot à qui l’on doit aussi une traduction de Diodore de Sicile, et du Daphnis et Chloé de Longus).

Edition de référence :

  • Les Belles Lettres [par défaut]

Collection des Universités de France (CUF)

Ont édité les Vies en 16 volumes (!) (compter 35 €/volume, neuf)

Le 16e volume est un index des noms propres.

Texte bilingue, comme toujours pour cette collection.

Dans la même collection : les Oeuvres morales de l’auteur.

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7 réponses
  1. Neo-Birt7
    Neo-Birt7 dit :

    La traduction classique des « Vies parallèles », biographies appariant un Hellène et un Romain sur une tonalité tantôt familière et tantôt héroïque d’après une solide documentation mais qui ne prétendent bien entendu jamais constituer autre chose que la reconstitution d’un caractère, est celle confectionnée par Amyot dans l’idiome délicieux de la Renaissance (1559, édition Gérard Walter à la Pléiade, avec une introduction et des notes étiques, 1937) ; une bonne partie de la littérature française, anglaise, espagnole, et pas seulement dramatique (Shakespeare, Corneille, etc), est sortie de la méditation de ces textes. La version Amyot fut très tôt attaquée pour les limites de sa critique philologique ainsi que sa dilection affirmée pour la glose explicative (notamment en matière d’institutions), et outre le contingent de faux-sens l’on peut considérer comme décevante sa contribution à l’épuration du texte grec disponible à l’époque ; le principal point aveugle de sa traduction tient néanmoins dans le travestissement infligé à Plutarque par la substitution d’une lenteur truculente et d’un naturel naïf qui incarnent le propre d’Amyot, puisqu’il a traduit dans la même veine les deux très sophistiques romans grecs de Longus (« Daphnis et Chloé ») et d’Héliodore (« Les Ethiopiques »), au style propre de Plutarque, une expression périodique remarquable pour la richesse et la tendance vers l’abstraction de son vocabulaire, l’incorporation incessante de citations poétiques amenées avec le plus grand naturel, l’aisance avec laquelle la forme usuellement placide se resserre soudain et frappe en médaille des sententiae qui se gravent dans l’esprit. L’image d’Epinal du « bonhomme Plutarque » qui a collé à la réputation du Chéronéen comme le sparadrap du capitaine Haddock repose donc sur le contresens volontaire d’Amyot, qui en les translatant modernisait ses auteurs grecs à la manière de Perrot d’Ablancourt au siècle suivant. Les traductions des Vies confectionnés par l’abbé Dominique Ricard (1798) puis par le très distingué écrivain et fin helléniste que fut Alexis Pierron (1843-1845), auteur d’un Eschyle français qui incarna pour la première fois un effort efficace pour rendre à ce poète hiératique sa grandeur et éditeur valeureux d’Homère dans la grande collection d’Hachette, ont beau reposer sur une constitution du texte grec bien supérieure, en raison des progrès de la philologie, leur langue n’a pas plus rivalisé en beauté avec celle d’Amyot que leur intelligence du texte et des antiquités classiques n’a rendu obsolète l’érudition de ce dernier. La grande édition Teubner des Vies par Claës Lindskog et Konrat Ziegler (1884-1974, le magister des études plutarchéennes au XXe siècle), Leipzig, 1914-1939 et rééditions, 4 vol. en 7 tomes, ayant enfin assis solidement les principes du texte grec, on a pu progresser au-delà d’Amyot. La meilleure traduction, à mon sens, est celle, parue aux Classiques Garnier, de Bernard Latzarus (I-IV, 1950 ; V, avec un bon index nominum, 1955) ; elle traduit scrupuleusement mais sans affectation de style périodique le grec de la première mouture de Lindskog-Ziegler dans un français vigoureux et simple. Une version d’un style plus orné figure dans la médiocre édition critique de l’historien et plutarchisant émérite Robert Flacelière assisté pour les deux premiers volumes du professeur de lycée par ailleurs totalement inconnu Marcel Juneaux (Paris, Les Belles Lettres, 1957-1979, 15 vol. plus un d’index sorti en 1983) ; Flacelière, qui a remanié la traduction réalisée par feu Emile Chambry (1864-1938) d’après la médiocre édition Doehner dans la collection Didot afin de l’accorder avec son propre texte grec, ne s’est pas grandi en éreintant dans les revues le travail de Latzarus, décédé en 1951, comme si sa propre oeuvre était exemplaire. Or l’on y dépiste moult calques du latin de Doehner ainsi que de nombreux pièges insidieux ; bien supérieure apparaît l’annotation, certes limitée, ainsi que les notices introductives à chaque Vie. Latzarus n’ayant jamais été réimprimé et se trouvant difficilement en intégralité sur le marché de l’occasion, je recommande la traduction d’Anne-Marie Ozanam dans la collection Quarto (Paris, 2001, assortie de 340 pages d’annexes indispensable [dictionnaire Plutarque, index]) ; elle dépend du texte grec de la Budé, et, bien plus souvent qu’il ne le faudrait, de la version Chambry-Flacelière, mais la clarté ayant présidé à sa conception, sa conscience, la modernité allègre de son français, en font un outil globalement satisfaisant.

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  2. Neo-Birt7
    Neo-Birt7 dit :

    Le cas de l’autre partie de l’oeuvre plutarchéenne, égale en volume aux Vies, est plus fascinant encore. Les « Oeuvres morales », en latin Moralia, en vérité des oeuvres mêlées, n’ont pas été transmises d’une manière uniforme ; la tradition manuscrite de cet ensemble de grandes dimensions représente un maquis où la lumière n’a commencé à surgir qu’avec l’énorme édition critique et commentée de l’illustre philologue hollandais Daniel Wyttenbach (« ΠΛΟΥΤΑΡΧΟΥ ΤΟΥ ΧΑΙΡΩΝΕΩΣ ΤΑ ΗΘΙΚΑ. Plutarchi Chaeronensis Moralia id est Opera, exceptis vitis, reliqua. Graeca emendavit, notationem emendationum, et latinam Xylandri interpretationem castigatam, subiunxit, animadversiones explicandis rebus ac verbis, item indices copiosos, adiecit », Oxford, 1795-1830, en 8 volumes, le dernier, subdivisé en deux parties, étant un dictionnaire toujours irremplacé de la langue plutarchéenne). De la lumière crue jetée sur les Moralia dans cet ensemble magnifique, où l’utilisation des manuscrits alors connus allait de pair avec une grande intelligence du style de l’auteur, une tête froide et un sens affûté de la langue, aboutissant à des conjectures définitives, on passe malheureusement aux ténèbres de l’obscurantisme avec l’édition Teubner de Gregorios Bernardakis, Leipzig, 1888-1896, 7 vol. : le texte y doit trop à un manuscrit de Paris (C) dont les travaux subséquents n’ont pas confirmé la précellence ainsi qu’aux conjectures personnelles de l’éditeur, le plus souvent inspirées par un médiocre feeling grammatical et stylistique pour l’idiolecte de Plutarque, l’apparat, très réduit, ne propose que peu de variantes issues d’une sélection drastique et partiellement mal fondée de manuscrits et enregistre plus souvent les interventions de Bernardakis, enfin les préfaces des derniers volumes débordent d’aigreur polémique, le volume I ayant été fort mal reçu en Allemagne et accablé de critiques par des juges aussi souverainement doués que Wilamowitz (esprit chagrin et belliqueux, Bernardakis se persuada qu’il devait y avoir des relents de xénophobie sous ces éreintements, ce qui est faux ou du moins très exagéré, les Anglais et les Français n’ayant pas non plus mâché leurs mots). Comment donc les traductions des Moralia confectionnées à la fin du XVIIIe siècle (Ricard, 1783-1795, 17 vol.) puis dans le courant XIXe (Victor Bétolaud, Paris, Hachette, 1870, 5 vol.) auraient-elles pu être autre chose qu’un éclairage diffus sur ces traités souvent difficiles et au texte mal établi par les éditions courantes dont ces pionniers ont disposé ? La seconde édition Teubner, encouragée par Wilamowitz qui pesa de son influence pour que l’on défriche la tradition manuscrite de chaque traité sur frais nouveaux, demanda quelques trois quarts de siècles (1925-1967, 4 vol. en 10 tomes) à un aréopage d’hellénistes souvent doublés de grands historiens de la philosophie, ainsi Max Pohlenz, le plus grand spécialiste du Stoïcisme ancien au XXe siècle ; les préfaces ainsi que les apparats constituent un acquis fondamental, le texte grec y est remarquablement établi, sans excès de conservatisme comme de critique conjectural, et l’édition Budé, lancée dans les années 70 sur le patron décidé par, et sous la direction éclairée de, Jean Defradas (1911-1974) puis poursuivi avec une vigueur plus grande encore par Flacelière (1904-1982), lui doit le plus clair de ses apports critiques. Les volumes les plus fiables au sein de cette entreprise très disparate sont ceux signés de deux autres plutarchisants émérites, François Fuhrmann, auteur d’une thèse splendidement perceptive sur les images dans le style du Chéronéen (« Propos de table », « Apophtegmes de rois et de généraux », « Apophtegmes laconiens), et Daniel Babut, dont la thèse massive sur « Le stoïcisme dans la pensée de Plutarque » demeure respectée même des anglo-saxons les plus difficiles et qui s’est avéré être un remarquable philologue (traités contre les Epicuriens, avec texte constitué par l’inénarrable Michel Casovitz) ; on prendra, en revanche, avec des pincettes tout ce qui provient de Flacelière lui-même, helléniste doué mais travaillant trop vite, de François Froidefond, médiocre grammairien doublé d’un esprit confus, et surtout de Jean Hani, philologue plus rusé que pénétrant, travailleur peu probe et intellectuel compromis tant avec la mouvance catholique traditionaliste qu’avec les billevesées de René Guénon, ce qui ne laisse pas de gêner quand il s’agissait d’interpréter la pensée religieuse de Plutarque. Les Moralia des Belles Lettres sont en voie d’achèvement.

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  3. Neo-Birt7
    Neo-Birt7 dit :

    La traduction Chambry-Flacelière est disponible à peu de frais dans la collection Bouquins chez Robert Laffont. Je ne dirai pas un mot de plus sur cette opération mercantile.

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  4. Luckas
    Luckas dit :

    Neo-Birt7, que pensez-vous de :
    Jean Sirinelli, Plutarque, Paris, 2000, Fayard, 522 pp. ?
    Je ne crois pas avoir lu d’appréciation de cet ouvrage sous votre plume …

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  5. Neo-Birt7
    Neo-Birt7 dit :

    C’est l’appréciation la plus juste et équilibrée disponible sur le Chéronéen, l’oeuvre d’un homme remarquablement intelligent. Je n’en dirai pas autant de l’ouvrage prétentieux de Jacques Boulogne « Plutarque. Un aristocrate grec sous l’occupation romaine », Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2003 (entre cette synthèse et son « Plutarque dans le miroir d’Epicure. Analyse d’une critique systématique de l’épicurisme », mêmes date et éditeur, Boulogne passe chez nous pour un éminent spécialiste de cet auteur ; cela n’en imposera pas à quiconque a lu d’un peu près son édition Budé des « Prouesses de femmes », des « Etiologies romaines et grecques » et des « Parallèles mineurs » [Paris, 2002], où les trop nombreuses coquilles dans le grec, les leçons textuelles impossibles ou du moins hautement bizarres défendues mordicus par conservatisme frileux, les faux sens dans la traduction, et le commentaire oscillant entre la surabondance lorsque le texte est clair comme le clair et la compression ou le silence en cas de difficulté, démasquent sûrement un philologue assez peu sûr doublé d’un exégète à la science plus étendue que profonde). Une alternative intéressante à Sirinelli tient dans la très longue ‘Introduction générale’, véritable somme plutarchéenne posthume, mise par Flacelière en tête du tome Ier des « Oeuvres morales » Budé, Paris 1987, pp. VII-CCXXXVI ; on y trouvera une discussion nourrie mais aisée de la biographie du Chéronéen puis de chacun des principaux versants de sa personnalité littéraire. Une fois lus Sirinelli et Flacelière, je suggère de feuilleter la grande thèse de Babut et d’échantillonner le merveilleux article de Frederick E. Brenk ‘An Imperial Heritage: The Religious Spirit of Plutarch of Chaironeia’, dans W. Haase (ed.), « Aufstieg und Niedergang der Römischen Welt, II . 36. 1 Philosophie (Historische Einleitung, Platonismus) », Berlin-New York, de Gruyter, 1987, pp. 248-349, savant tout à l’opposé du verbeux et plat Boulogne (je déconseille en revanche le travail de Froidefond ‘Plutarque et le platonisme’, dans le même ouvrage, pp. 184-233).

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