Hésiode est l’auteur de « La Théogonie » et « les Travaux et les jours ».

La Théogonie décrit la naissance du monde et des dieux. C’est une source importante de notre culture.

Les Travaux et les jours est un poème didactique. La première partie décrit les 5 âges de l’humanité, le mythe de Pandore…

Edition de référence :

Les Belles Lettres [par défaut]

Collection des Universités de France (CUF)

Texte établi et traduit par Paul Mazon.

24 €

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17 réponses
  1. Neo-Birt7
    Neo-Birt7 dit :

    Les éditions de référence sont celles de Martin L. West, à la fois pour la qualité du texte grec, pour la présentation de la tradition textuelle dans l’introduction et dans l’apparat critique (ses collations des manuscrits sont excellentes, sa reconstitution de la généalogie textuelle peut être considérée comme définitive, son établissement du texte n’appelle a priori pas de retouches); on y trouvera des introductions développées et un commentaire quasiment exhaustif, mais, conformément aux protocoles universitaires de l’époque, pas de traduction anglaise :

    « Hesiod. Theogony. Edited with Prolegomena and Commentary », Oxford, Clarendon Press, 1966 (la partie des prolégomènes qui concerne la langue et la versification est valable pour la Théogonie comme pour les Travaux et les Jours).
    « Hesiod. Works and Days. Edited with Prolegomena and Commentary », Oxford, Clarendon Press, 1978.

    West ne s’est pas occupé du « Bouclier » pseudo-hésiodique, dont les seuls 56 premiers vers sont du poète d’Ascra; l’édition de référence reste celle, en petit format, de Carlo F. Russo, « Hesiodi Scutum. Introduzione, testo critico e commento con traduzione e indici « , Florence, La Nuova Italia, 1950, révisée en 1965, excellente mais pas aux standards de West.

    Une édition critique abrégée de bon aloi, signée par Friedrich Solmsen, est disponible pour les trois poèmes hésiodiques dans la série des ‘Oxford Classical Texts’ (« Hesiodi Theogonia, Opera et Dies, Scutum », 1970, 1983, 1990, avec une sélection de fragments). L’édition de ces derniers qui fait autorité a été donné par West et Reinhold Merkelbach: « Fragmenta Hesiodea », Oxford, Clarendon Press, 1967, réimpr. Londres / Chicago, Sandpiper Books, 1999. Le vieux volume Budé de Paul Mazon a tous les défauts de son époque, en particulier une approche radicale du problème des interpolations dans la Théogonie, qui lui fait imprimer entre crochets de trop nombreux passages auxquels West et Solmsen ne touchent pas, et presque aucune des vertus des meilleurs travaux de l’époque ; entièrement tributaire de l’édition Teubner d’Aloys Rzach (editio maior, véritablement excellente pour son temps, 1902 ; editio minor, encore disponible dans le commerce, 1908), Mazon en galvaude les résultats en composant un apparat critique inutilisable, à la fois squelettique et rédigé d’une manière qui s’est avérée scientifiquement absurde, comme en donnant un texte grec où sont négligés les problèmes orthographiques et dialectaux. En revanche, il reste utile de consulter la grande édition critique, également très « analytique » (pratiquement la moitié du poème est signalisée comme interpolée ; très pratique à cet égard est http://urlz.fr/6l1s), de la Théogonie par Felix Jacoby (Berlin, Weidmann, 1930, avec riche introduction latine) ; elle donne un texte et un apparat presque aussi satisfaisants que ceux de West.

    Pour le commentaire, West et Russo restent des ressources extrêmement solides. Le livre de W. J. Verdenius, « A Commentary on Hesiod. Works and Days, vv. 1-382 », Leyde, Brill, 1986, est un complément dépourvu de génie et de pénétration à West 1966 bien plutôt qu’un progrès ou même un remplacement partiel. Martina Hirschberger a donné un commentaire un peu laborieux et plat mais néanmoins très utile aux deux plus grands poèmes perdus par la tradition directe (« Gynaikōn Katalogos und Megalai Ēhoiai. Ein Kommentar zu den Fragmenten zweier hesiodeischer Epen », Munich / Leipzig, Saur, 2004). On n’oubliera pas de consulter, si l’on peut (cet ouvrage est devenu fort rare), la massive synthèse de Jacques Schwartz « Pseudo-Hesiodeia. Recherches sur la composition, la diffusion et la disparition ancienne d’oeuvres attribuées à Hésiode », Leyde, Brill, 1960, qui a posé le plus clair des jalons sur lesquels repose l’édition Merkelbach-West (les datations retenues pour ces oeuvres ne sont pas tenables, il y a quelques erreurs et beaucoup de systématisation forcée, mais ce travail scrupuleux demeure exemplaire).

    On est assez bien lotis en matière de traductions françaises. Sans remonter au XIXe siècle, époque où les manuscrits hésiodiques étaient mal connus et le texte de notre poète établi sur des bases contestables, signalons E. Bergougnan, « Hésiode et les poètes élégiaques et moralistes de la Grèce », aux Classiques Garnier (s.d.) ; l’Hésiode se laisse lire agréablement, avec l’aisance propre aux professeurs de cette époque révolue lorsqu’ils se piquaient de translater du latin ou du grec, et la trentaine de pages de notes procure les premiers secours exégétiques. La meilleure version, pour ce qui est du style et de la précision, est cependant toujours celle de Mazon dans l’édition Budé : à la fois belle, fluide, euphonique, harmonieuse, son classicisme a bien vieilli, même si Mazon pare uniformément le style assez raboteux de l’original grec d’un charme sonore qu’il n’a que fort épisodiquement (ainsi dans le très long prologue de la Théogonie). La version du poème généalogique par Annie Bonnafé, qui fit sa thèse sur notre vieil aède, semblera manquée à tous ceux qui recherchent une certaine harmonie dans le rendu de compositions en hexamètres dactyliques grecs (« Hésiode, Théogonie : la naissance des dieux. Traduction, présentation et notes de A. B. précédé d’un essai par Jean-Pierre Vernant », s.l., Rivages Poches, 1994) ; la préface est du pur Vernant, verbeux et assez creux, et on cherchera vainement des éclaircissements dans ce petit volume trop vulgarisé. Ces derniers se trouvent, en revanche, signés par une autre spécialiste (Marie-Christine Leclec), dans l’Hésiode complet traduit par Philippe Brunet : « Hésiode. La Théogonie, Les Travaux et les Jours, et autres poèmes » (je cite la première de couverture, le titre intégral étant trop long), Paris, Le Livre de Poche, 1999. Cet ouvrage procure la traduction littérale des fragments collectés par Merkelbach-West, ainsi qu’un rendu ligne à ligne des trois grands poèmes dont les prétentions littéraires sont assez minces en dehors d’un français plus aisé que celui de Bonnafé ; bonus importants, une centaine de pages de « Commentaire » littéraire par Leclerc y sont disséminées, ainsi que la première version française depuis plus d’un siècle de ce que les spécialistes nomment en latin le « Certamen », Tournoi légendaire entre Hésiode et Homère. Je recommande chaudement le Brunet-Leclerc, tout en suggérant de lire pour le plaisir les traductions Mazon. On le voit, j’ai écarté l’Hésiode de Leconte de Lille ; le poète cubano-français ignorait notoirement le grec, et je ne puis trouver nul charme à ses cacographies (« Muses Hélikoniades » par exemple est absurde pour rendre un génitif pluriel, « les Aoides et les Kitharistes » tient du décalque gratuitement mécanique, etc).

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  2. Ben
    Ben dit :

    J’ai récemment lu les œuvres « plus-que-complètes » d’Hésiode, dans deux éditions: les « Classiques de Poche » (LdP) et « folio classique ».

    Le folio, traductions et édition de Jean-Louis Backès, contient la Théogonie et les Travaux, ainsi que les Hymnes homériques (trente-trois poèmes de longueurs, auteurs anonymes et dates de composition très variés; chacun s’adresse à une divinité et la plupart relatent un épisode particulier de sa « vie », si l’on peut employer ce mot pour un immortel). Une courte préface sur la poésie religieuse (et non « sacrée ») de la Grèce archaïque justifie ce rapprochement de textes, tous écrits en hexamètres dactyliques. Brèves chronologie, bibliographie et note de traduction (ce qui est toujours « rassurant » pour un profane), index et notes explicatives, brèves mais suffisantes à une bonne compréhension du texte. La traduction rend les hexamètres par l’alternance en français d’un vers long et un vers court.

    Le Poche, traductions et préface de Philippe Brunet, introduction et commentaire sur chaque texte de Marie-Christine Leclerc, contient la Théogonie, les Travaux, le Bouclier (apocryphe) et presque tous les fragments et scholies que nous possédons d’Hésiode, notamment ceux du Catalogue des femmes, ainsi que la Dispute d’Homère et d’Hésiode. Courte bibliographie, note sur l’édition (le texte se base sur les éditions critiques de Mazon et de Merkelbach et West, donc du solide), index. La traduction rend les hexamètres dactyliques en… hexamètres dactyliques, ce que Brunet a aussi fait pour l’Iliade (voir mon commentaire du 7 janvier 2018 sur la page consacrée à Homère). Les commentaires sont très intéressants et un peu plus fournis que leur équivalent en notes du folio.

    En conclusion, je conseille ces deux livres, même si, de format poche, ils n’ont bien sûr pas la prétention de se substituer à des éditions critiques. Je trouve qu’ils se complètent utilement: les fragments, notamment du Catalogue des femmes, ainsi que les Hymnes, « résonnent » avec la Théogonie et les textes s’éclairent les uns les autres; d’autre part, la vie est certes courte pour nous mortels, mais les deux poèmes fondateurs que sont la Théogonie et les Travaux aussi, et il est intéressant de les lire dans deux traductions différentes (celle de Brunet m’a paru plus fluide), d’autant que les appareils critiques, de formes différentes (« notes » pour l’un, « commentaire » pour l’autre) apportent des éclairages complémentaires. Le Bouclier (d’Héraklès, qui se veut une imitation de la belle description du bouclier d’Achille dans l’Iliade) n’a pas le même souffle.

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  3. zino
    zino dit :

    Bonjour amis hellénistes,
    Juste pour corriger une petite erreur : Le poète cubano-français, c’est évidemment Hérédia, dont les « Trophées » sont effectivement un décalque des sources helléno-romaines. Leconte de Lisle, quant à lui, était d’origine Réunionnaise.
    Leconte de Lisle est plus approximatif, mais sa poésie témoigne également d’une sensibilité plus affirmée ( malgré la feuille de route du projet Parnassien) Hérédia, plus respectueux des sources, est un poète talentueux, mais froid.
    Fin du HS…

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    • Domonkos Szenes
      Domonkos Szenes dit :

      Je trouve cet avis très intéressant – j’aimerais bien que Draak vous donne l’occasion de développer, concernant Heredia et Leconte de Lisle : ils sont à la fois si connus et si méconnus que j’aimerais bien avoir sur eux des éclairages actuels.

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  4. Ben
    Ben dit :

    Je serais moi aussi intéressé de connaître l’avis de Neo sur la poésie archaïque hors Iliade et Odyssée. Voici ce que j’ai trouvé au cours de mes pérégrinations électroniques (notamment http://www.hup.harvard.edu/collection.php?cpk=1031).

    Le volume

    Hesiod, The Homeric Hymns and Homerica (ed. Hugh G. Evelyn-White), LCL, xlviii + 639 pages, 1914.

    contient selon Evelyn-White « pratiquement tout ce qui reste de la poésie épique pré-académique » [hors Iliade et Odyssée, et en 1914]. Il a le mérite d’être disponible en ligne, et l’introduction est intéressante, même si probablement dépassée (on a retrouvé beaucoup de fragments depuis, notamment du Catalogue des femmes).

    Dans le volume

    Greek Epic Fragments (ed. M. L. West), LCL 497, x + 316 pages, 2003.

    West indique dans la préface que « la vieille édition de Evelyn-White regroupait…; ces textes sont maintenant répartis dans trois nouveaux volumes, dont chacun contiendra une quantité considérable de nouveau matériel. Le présent volume a été augmenté pour contenir plus ou moins tout ce qui reste de la poésie épique, jusqu’à Panyassis inclus ». Contient: cycle thébain, cycle troyen, poèmes sur Héraklès et Thésée, Généalogies.

    Les deux (en fait, trois) autres nouveaux volumes de Loeb sont:

    Homeric Hymns. Homeric Apocrypha. Lives of Homer (ed. M. L. West), LCL 496, 480 pages, 2003.
    Hesiod Volume I, Theogony. Works and Days. Testimonia (ed. G . Most), LCL 57, 400 pages, 2007.
    Hesiod Volume II, The Shield. Catalogue of Women. Other Fragments (ed. G . Most), LCL 503, 448 pages, 2007.

    Questions subsidiaires: Quand ces textes ont-ils disparu ? En particulier, les auteurs comme Pausanias, Triphiodore, Collouthos, Quintus de Smyrne, Stace, qui ont écrit des « suites » de récits épiques, avaient-ils accès à ces textes ? Par exemple, à quel point la « Prise de Troie » de Triphiodore est-elle une « imitation » du « Sac de Troie » du cycle troyen ?

    On a retrouvé beaucoup de fragments et papyrus au cours du XXème siècle (Catalogue des femmes, Stésichore, Ménandre, villa des papyrus de Pompéi…) et même plus récemment (Sappho). A-t-on encore des chances d’en découvrir de nouveaux ? Je me dis, un peu naïvement peut-être, qu’avec la multiplication des fouilles archéologiques, les gisements doivent être plus ou moins épuisés, et de même, avec la numérisation des réserves des bibliothèques et les nouvelles technologies, les découvertes de palimpsestes ou de manuscrits perdus dans des greniers de bibliothèques ont maintenant toutes été faites. J’aimerais bien sûr me tromper.

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  5. francis moury
    francis moury dit :

    C’est sur les deux volumes du Hesiod de la Loeb Classical Library, Harvard University Press, 2007 que j’aimerais avoir à l’occasion, comme sur tous les LCL d’auteurs anciens ici mentionnés, l’avis du philologue Neo-Birt7.

    Je note que finalement, selon lui, concernant Hésiode, la meilleure traduction demeure celle de Paul Mazon (C.U.F. publiée sous les auspices de l’Association Guillaume Budé, éd. Belles-lettres), signe que le texte, en dépit de son mince apparat critique, n’est pas si mal établi.

    Sur les Parnassiens, puisque nous en parlons, j’admire une chose, le fait que L. de L. n’ait pas francisé les noms grecs. Sans eux, du reste, il nous manquerait un pont entre romantisme et symbolisme, pont essentiellement grec mais aussi romain.

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    • Neo-Birt7
      Neo-Birt7 dit :

      La vieille Loeb d’Evelyn-White est sans grand intérêt : même si elle a eu le mérite de se retenir d’archaïser, à une époque où cette mode sévissait (l’Herodas, les poètes iambiques et méliques de la Loeb en sont devenus pratiquement illisibles), la traduction date beaucoup, le texte repose sur des éditions médiocres, et de toute manière a été dépassé par les trouvailles papyrologiques des trois quarts de siècle subséquents, notices et notes sont d’une frugalité qui suppose le type de connaissances mythologiques et littéraires que plus personne n’a aujourd’hui hormis les hellénistes chevronnés. Les volumes d’Hymnes et de fragments épiques procurés par Martin West offrent des traductions de haute volée en face de textes grecs établis avec la rigueur et la connaissance insurpassable de la poésie archaïque à laquelle seul peut prétendre un philologue ayant édité la plus grande partie de ce corpus avec un talent qui force l’admiration (en face des connaissances, de la sûreté critique et de l’instinct philologique de West, Mazon, Dain, Irigoin sont des nains rabougris) ; le revers de cette médaille tient au caractère souvent extrêmement personnel des appréciations littéraires, voire des datations et des rapports entre ces poètes et l’épos homérique, que West n’a pas craint d’imposer à un public non spécialisé. Or les paralogismes, voire les erreurs, y abondent ; sur la fin de sa carrière, West était en effet devenu si notoirement dédaigneux des résultats de ses prédécesseurs, si enclin à marcher à tout prix sur leurs brisées même quand les raisons qu’il alléguait n’autorisaient guère le ton de certitude cassant dont il avait fait sa marque de fabrique, que l’appareil scientifique de ses Loebs est plus brillant que solide et plus hâtif que fondé. J’en donnerai un seul exemple : il fait de l’énigme versifiée de la Sphynx transmise par une dizaine de sources tardives son fragment 2* de l’épopée cyclique perdue nommée l’Oedipodie avec pour seule justification ces quelques mots : « this hexameter version of the Sphinx’s riddle is quoted by various sources which go back to Asclepiades of Tragilus (late fourth century BC). There is a good chance that he took it from the Oedipodea » (Epica, p. 41 note 1). L’ennui est qu’une enquête exhaustive a montré combien cette conclusion était au mieux précaire, au pire infondée : « Épopée cyclique ancienne, tragédie classique, jeu d’esprit isolé, l’éventail des origines possibles de l’énigme adespote couvre ainsi un champ bien plus large et diversifié que ne le suggère West pour les besoins de sa cause » (J. F. Nardelli, ‘L’Orient dans le Cycle’, in G. Scafoglio (ed.), « Studies on the Greek Epic Cycle II », Pise-Rome, Fabrizio Serra, 2015, p. 68, cf. 111-112 pour une dénonciation acerbe des mauvais procédés westiens : « West, lui, ose inscrire dans le marbre d’une collection de fragments que destinent au succès la présence d’une élégante traduction juxtapaginale et le prestige de la série qui l’accueille, l’hypothèse indémontrable de Carl Robert comme si elle se dispensait de preuve après un siècle de recherches. Cet ipse dixit est non seulement insupportable ; il valorise à outrance la situation chronologique privilégiée du dernier interprète. Or, dans le présent cas de figure, il s’est produit si peu d’accroissement documentaire que la question n’a pas changé de face. Ce qui était du temps de Robert une possibilité attractive mais suspendue sur un vide littéraire béant vaut encore aujourd’hui. Ne mâchons pas les mots : insérer nos cinq vers dans une épopée cyclique, l’Oedipodie, que son obscurité rend vulnérable à toutes les manipulations, est une bouffée de Glasperlenspiel cavalier et imaginatif renouant avec la fièvre conjecturiste des années 1850-1890. » Voilà ce qui se produit quand un immense savant, au soir de sa vie, se laisse aller à la facilité et à sa virtuosité ; on s’expose à se faire réfuter sèchement par des spécialistes plus humbles qui, eux, se sont donné la peine de tout scruter au microscope. La Loeb des Epica et des Hymnes est donc à prendre avec des pincettes pour ce qui concerne le commentaire exégétique ; texte et traduction y sont splendides. Je ne peux en dire autant de la Loeb hésiodique par Glenn W. Most, compilation dérivative dépourvue de distinction philologique et d’assez faible valeur littéraire ; le choix de ce philologue très connu étonne d’autant plus qu’il ne s’est fait remarquer par aucun travail scientifique sur le poète d’Ascra.

      M. Moury, la Budé de Mazon vaut par sa superbe traduction ; le texte ne possède aucune valeur spéciale.

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  6. zino
    zino dit :

    Cher Domonkos,
    Ces deux poètes sont chers à mon cœur. Vous qui, comme moi, appréciez l’univers de Howard, je vous invite à lire le cycle des poèmes barbares. Leconte de Lisle y déploie un sens de l’épique proprement stupéfiant ! Ses descriptions tiennent à la fois de l’ekphrasis la plus saisissante et du fantastique le plus inventif !
    Qaïn, le poème qui ouvre le recueil ( si mes souvenirs sont bons…) atteint – parfois – la grandeur visionnaire des premiers poèmes de La Légende des siècles. Il y a chez lui, souvent, une tendance à l’emphase, une jubilation entêtante à l’énumération de noms propres, aux sonorités rugueuses ( et qui peut fatiguer le lecteur) mais le souffle épique rend ces poèmes non seulement agréables à lire, il nous invite également à réviser nos jugements sur un courant esthétique, le Parnasse, trop souvent écarté au profit du Romantisme.
    Quant à Hérédia, ses sonnets sont des chefs d’œuvre de concision évocatrice.
    Je vous conseille vivement de vous les procurer en folio poésie, les notes y sont abondantes.
    Je crois que Champion les a édités en œuvres complètes.

    Répondre
    • Domonkos Szenes
      Domonkos Szenes dit :

      Vous me réconfortez.
      Ce sont des amours qu’on est forcé de garder secrètes, au risque, en cas de coming out, de se voir exposé aux quolibets et à l’indignité publique… Je vais suivre votre conseil et me procurer les folio poésie. Pour Champion, en général hors de portée de ma bourse, j’explorerai le marché de l’occasion (quand il n’est pas plus cher que le neuf !).

      Simple annecdote : je suis récemment tombé par hasard sur un curieux petit livre, daté de 1925 et édité « pour la Société des Médecins Bibliophiles » (?… marrant, non ? il s’agit évidemment d’un tirage spécial) des « Contes en Prose (Impressions de Jeunesse) » de Leconte de Lisle : il ne s’agit pas d’une oeuvre majeure, bien sûr, mais j’ai eu le plaisir d’offrir à des amis réunionais ces petits contes de l’Ile Bourbon. (Avec une préface de 35 pp. de Jean Dornis, que, dans mon ignorance je ne connaissais pas ; occasion me fut ainsi donnée de m’instruire et d’apprendre que sous ce nom se dissimulait une « muse et admiratrice » de Leconte de Lisle dont elle recueillit le dernier souffre dans son pavillon de Voisins… Il n’y a rien de mieux que les livres pour voyager à moindre frais, sans lassitude, dans le monde visible comme dans le monde invisible.)

      Des poèmes qu’on me faisait anôner à l’école primaire, peu me sont restés en mémoire, et parmi ces rares rescapés le « Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal… » etc figure dans le trio de tête. Si évocateur que, lors de mon récent séjour de deux années à Wallis et Futuna j’ai plus d’une fois eu l’impression de « (regarder) monter en un ciel ignoré – Du fond de l’Océan des étoiles nouvelles ». Ce poème (trop célèbre ?) est à mes yeux de la haute poésie. Je pense qu’on n’échappe pas sans raison à plus de cinquante années d’erratiques navigations et de naufrages mémoriels d’un cerveau enfantin.

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  7. DraaK fut là
    DraaK fut là dit :

    Cher Zino, cher Domonkos,

    Noms connus sans être Hugo ni Molière ; qualité littéraire ; bons représentants d’un mouvement qui a fait l’histoire : ces auteurs ont bien sûr leur place dans la deuxième vague des auteurs dont il faut absolument ouvrir la page sur propagerlefeu.fr (deuxième vague chronologique dont l’existence ne repose que sur mon agenda trop chargé ; rien de dépréciatif).
    Je vous demande un peu de patience : j’ouvre leurs pages cette semaine.

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  8. zino
    zino dit :

    Bonjour Domonkos,
    Pour répondre à Draak ( voilà bien un nom que n’aurait pas refusé Leconte de Lisle pour l’un de ses poèmes 😄 ) j’ai bien sûr relativisé ma comparaison avec Hugo, en utilisant l’adverbe « parfois »
    Du reste, Hugo, pour sa grande histoire de l’humanité, ne s’embarrasse pas vraiment de justesse historique. Ce qui compte c’est l’effet dramatique. Et
    Là-dessus, les Parnassiens sont des maîtres. J’irais même jusqu’à dire qu’ils surpassent les Romantiques ( à l’exception de Hugo, qui de toute façon représente une forme de synthèse, indépassable, de toutes les écoles, de tous les genres de toutes les écritures possibles)
    Nous aurons peut-être l’occasion d’en reparler.
    Domonkos vous avez raison de dire que ces poèmes appartiennent à notre mémoire ainsi qu’à notre patrimoine. Et je regrette personnellement que ces auteurs ( mineurs, si on veut ; mais ça ne veut rien dire) ne soient pas proposés plus souvent aux programmes universitaires.
    Faites vous plaisir, lisez la « Trebbia » ou « Après la bataille ». Ce sont des films en Cinémascope !

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    • Domonkos Szenes
      Domonkos Szenes dit :

      Merci. Je vais arrêter là pour ne pas polluer cette section Hesiode (mais je fais forte pression sur Draak pour qu’il ouvre une section Heredia-Leconte de Lisle, ha ha ha !)

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