L’ensemble de l’article est de notre ami Lombard.
Qu’il soit encore remercié.
Marivaux (1688 – 1733), né Pierre Carlet
Plus intéressant qu’une biographie (que l’on peut trouver ailleurs), l’objet de cet article est au cœur de la question « Pourquoi l’ensemble du théâtre de Marivaux constitue-t-il un classique ? », et plus précisément – selon la volonté initiale du créateur de ce site -, « Pourquoi est-il une pépite pour le lecteur contemporain ? ».
Marivaux (1688 – 1733), né Pierre Carlet
Plus intéressant qu’une biographie (que l’on peut trouver ailleurs), l’objet de cet article est au cœur de la question « Pourquoi l’ensemble du théâtre de Marivaux constitue-t-il un classique ? », et plus précisément – selon la volonté initiale du créateur de ce site -, « Pourquoi est-il une pépite pour le lecteur contemporain ? »
Edition de référence
L’intégrale du théâtre de Marivaux est disponible dans la Bibliothèque de la Pléiade en deux versions :
– Théâtre complet en un tome, édition et préface de Marcel Arland – parution le 31 Janvier 1950, n° 79, 1632 pages
– Théâtre complet « Nouvelle édition » en deux tomes, édition d’Henri Coulet et Michel Gilot, tome I – parution le 4 Mars 1993, n° 79 (reprise de la numérotation de l’édition originale), 1376 pages, et tome II – parution le 15 Février 1994, n° 405, 1248 pages.
Il s’agit ici d’une édition de référence. L’amateur de commentaires abondants optera pour la nouvelle édition en deux tomes. Celui qui souhaite surtout lire l’ensemble des pièces de Marivaux avec néanmoins une préface érudite de soixante pages écrite par Marcel Arland (académicien français et directeur de la NRF) lui préfèrera la version en un seul tome.
Dix bonnes raisons de lire (encore) le théâtre de Marivaux
1/ Marivaux a inventé un genre théâtral
Pour situer Marivaux dans l’histoire théâtrale de son temps, rappelons qu’au début du XVIIIe siècle Molière est encore omniprésent dans les esprits et sur les scènes tandis que Regnard et Le Sage terminent leur carrière. Sur scène on joue surtout Dancourt, Dufresny et Destouches.
C’est alors que Marivaux invente un nouveau type de comédie dont il est virtuellement le seul représentant : la comédie de sentiments. En cela il rompt totalement avec les comédies de Molière. Il apporte en effet sa touche personnelle et trace un chemin original dans la tradition du théâtre comique tout en tenant compte du changement des sensibilités intervenu au cours de la première moitié du XVIIIe siècle.
2/ Le théâtre de Marivaux surprend par sa variété
Marivaux ne se consacrera pas à la tragédie : après Annibal il abandonne aussitôt le genre. Dès Arlequin poli par l’amour, il découvre sa veine comique. Il poursuit avec La surprise de l’amour et La double inconstance où il devient le maître de l’analyse amoureuse.
Malgré le triomphe de ces pièces, il s’essaie à d’autres variations avec une comédie héroïque et romanesque, Le Prince travesti, puis des comédies de pure intrigue, La Fausse suivante et Le Dénouement imprévu.
Plus tard il s’essaie à la comédie sociale avec L’Île des esclaves, à la comédie de mœurs avec L’Héritier de village ou encore à la « moralité allégorique » avec Le Triomphe de Plutus.
S’il est bien un dramaturge que l’on a accusé à tort de se répéter, c’est bien Marivaux.
3/ Le théâtre de Marivaux est subtil.
Toute l’œuvre de Marivaux décrit la phase de l’amour naissant, avec ses troubles, ses émois et ses questionnements. À deux exceptions près les intrigues qui peuvent paraître proches au néophyte diffèrent en réalité toutes. Les différences sont subtiles, parfois ténues ; ce sont précisément ces nuances qui permettent l’exploration de tout ce que l’on peut ressentir au cours de la période où naît l’amour, au cours de ces instants qui peuvent parfois déterminer une vie entière. C’est justement grâce à la finesse de l’analyse que l’œuvre théâtrale de Marivaux brille par son intelligence et sa profondeur.
Marivaux est l’auteur du XVIIIe siècle le plus joué à la Comédie Française et le cinquième le plus joué toutes époques confondues. Il s’impose comme l’un de nos plus grands dramaturges. Son art théâtral est souvent complexe : pour ne prendre que Les fausses confidences – comédie de sentiments emblématique par excellence -, il s’agit d’une pièce où l’on retrouve aussi bien des esquisses de peinture sociale que des ressorts dramatiques propres à la farce et même une action typique de la comédie d’intrigue.
4/ Le théâtre de Marivaux est écrit dans un style inédit.
L’écriture, très riche et si subtile, est d’une grande souplesse et d’une infinie délicatesse, ce qui permet à l’auteur d’éviter l’écueil tentant de la mièvrerie. Quant à la critique sous-jacente de la société, elle fait l’objet d’un style franc et direct qui ne montre aucune faiblesse dans le propos.
Les critiques ne tarissent pas d’éloges pour qualifier le style de Marivaux : on évoque volontiers « une langue étincelante de subtilité, de finesse et d’acuité », un langage qui « assure l’unité de tous les tons, de toute la palette déployée de la comédie ». Le qualificatif qui revient le plus souvent à propos du vocabulaire de Marivaux est « ciselé ».
5/ Le théâtre de Marivaux utilise le langage comme ressort dramatique
Dans les comédies de Marivaux le langage n’est pas seulement le support de la communication : il est un élément central de la dramaturgie en tant que porteur et révélateur de la vérité des sentiments. Les mots ne sont pas les simples signes qui signifient exactement ce que l’on dit, ils gagnent au contraire en épaisseur parce qu’ils se trouvent paradoxalement chargés de tout ce qu’un personnage ne parvient pas ou ne souhaite pas communiquer verbalement.
Un exemple typique pourrait être La double inconstance qui, sous le style simple et élégant qui caractérise toute l’œuvre de Marivaux, offre au spectateur et au lecteur des dialogues dont les répliques fusent, jaillissent, explosent ou rebondissent en un véritable feu d’artifice.
6/ Le théâtre de Marivaux est drôle.
L’immense dramaturge qu’est Marivaux possède un sens aigu du comique. Au-delà des sourires que provoque la finesse de son style, il n’hésite pas à faire rire le spectateur par sa peinture de personnages qui s’empêtrent dans le trouble et la confusion, ou encore par l’impertinence subtile des répliques à brûle pourpoint de ses valets de comédie qui, aussi roublards, menteurs, buveurs, traîtres, simulateurs ou intéressés qu’ils paraissent, n’en sont pas moins fidèles, astucieux, serviables, aimants et dévoués à la cause de leurs maîtres.
Dans ces comédies de Marivaux qui ont le pouvoir de nous faire sourire et même rire, on retrouve aussi tous les ressorts du comique de situation et parfois ceux de la farce. Marivaux utilise magistralement l’humour comme véhicule pour aborder des questions essentielles non seulement en lien avec l’amour et le mariage mais aussi dans son analyse critique des rapports entre les couches sociales.
7/ Le théâtre de Marivaux est social
Si, comme Molière l’a fait avant lui, Marivaux décrit avec un grand réalisme et beaucoup d’humour certains traits de caractères, c’est toujours avec une apparente absence de jugement et beaucoup de bienveillance. Mais il va bien plus loin dans sa description des couches sociales autres que les nobles et les bourgeois : ainsi, serviteurs, suivantes, valets, laquais et paysans sont analysés avec une pertinence et une précision quasi sociologique
Parfois, la critique sociale qu’adresse Marivaux à ses contemporains est virulente : même si l’on ne peut parler d’écrits réellement subversifs ni de féminisme au sens actuel de ces termes, ses comédies s’inscrivent néanmoins dans cette période d’intense réflexion et de remise en question qui s’achèvera avec la Révolution française.
À titre d’exemple, L’île des esclaves est une comédie sociale corrosive où l’on sent déjà comme un avertissement à la classe dirigeante, comme un avant-goût de révolte. Les fausses confidences est à sa façon une comédie sociale, mais aussi un les prémices de la révolte féministe. Dans La Colonie, Marivaux se fait le chantre des droits de la femme. Dans la plupart des pièces de Marivaux le premier rang revient aux personnages féminins qui sont toujours d’une grande complexité.
8/ Le théâtre de Marivaux s’adresse à tous.
Tout le monde a aimé, aime ou aimera un jour. Il n’y a pas d’âge ni de condition sociale qui échappe à l’amour sous une forme ou sous une autre.
Marivaux consacre sa vie et son œuvre à analyser l’amour naissant avec précision et profondeur, à le décortiquer sous tous ses aspects et à le peindre avec un charme inégalé avant lui et probablement inégalable après lui.
Il est impossible de ne pas s’identifier à l’un ou plusieurs de ces personnages empêtrés dans les contradictions de leur jugement amoureux, parfois faibles, souvent indécis, mais au final attachants et dont les aventures amoureuses ne laissent pas de faire rêver les spectateurs et les lecteurs d’aujourd’hui comme elles firent rêver les contemporains de Marivaux.
9/ Le théâtre de Marivaux est moderne
À la lecture des comédies de Marivaux ou à la sortie du théâtre, aujourd’hui encore les réactions sont unanimes : la modernité des pièces frappe le lecteur et le spectateur.
Le choix du partenaire amoureux est souvent l’une des clefs de l’intrigue : bien que les mariages arrangés soient aujourd’hui moins fréquents qu’au XVIIIe siècle, de nos jours le poids de l’appartenance sociale, du milieu culturel et du parcours individuel reste immense sur les possibilités de rapprochement des individus.
En son temps, certaines pièces de Marivaux furent interdites. Même si la société a évolué, la transposition est aisée pour s’apercevoir que la critique de certains caractères ou de certains milieux reste plus que jamais d’actualité.
10/ Le théâtre de Marivaux est intemporel
L’univers des comédies de Marivaux subit une importante stylisation qui leur confère une dimension atemporelle. Cette stylisation intervient au niveau temporel comme sur le plan spatial. Le temps dramatique est anhistorique : aucun évènement qui se produit sur scène ou qui relève des propos des personnages ne permet vraiment de situer l’action au XVIIIe siècle ni réellement à une autre époque.
Marivaux a beau s’accommoder de la règle des vingt-quatre heures, le temps paraît toujours s’écouler si naturellement qu’il n’attire jamais sérieusement l’intérêt des personnages tout occupés par leurs sentiments. Il en va de même pour le traitement de l’espace : l’action se déroule souvent à l’intérieur d’une maison située à la campagne où se retirent des « amants » dépités par les mœurs du temps en matière du cœur. Si Paris n’est jamais loin, le Paris historique n’est jamais cité ; on évoque plutôt une certaine idée que l’on se fait des façons de vivre dans la capitale. Outre la langue, le seul élément qui ancre plus clairement l’action de certaines pièces dans la première moitié du XVIIIe siècle relève de la hiérarchie sociale propre à l’organisation de la société de l’Ancien Régime.
Marivaux fait ainsi abstraction d’une grande partie de la réalité sociale et historique pour ne s’intéresser qu’à la dialectique du cœur humain. En plus de la vérité dans le traitement des sentiments, cette abstraction semble conditionner la pérennité de son théâtre resté vivant depuis trois siècles. Elle se prête aisément à une actualisation scénique telle que pratiquée par la mise en scène contemporaine.
LE LECTEUR RECOMMANDE
Il est d’usage de classer les pièces de Marivaux par genre. Jean Fleury dans Marivaux et le marivaudage (1881), Gustave Larroumet dans Marivaux, sa vie et ses œuvres (1882), Jean Fournier et Maurice Bastide dans leur Théâtre complet de Marivaux (1946) s’y sont essayés. Pour les « genres » des pièces, on retient ici l’essai de classification établi en 1949 par Marcel Arland.
Bien qu’elle recoupe partiellement celles des critiques plus « scolaires », la « liste de favoris » proposée ici est éminemment subjective. Par exemple ne sont pas retenues comme indispensables les deux catégories de pièces que sont les comédies morales « sociales ou philosophiques » ni les comédies morales « allégoriques », bien qu’elles soient souvent citées pour leur aspect visionnaire ou prémonitoire. Si leur genre semble un peu vieilli et daté, en revanche les simples comédies d’amour ou de mœurs paraissent conserver aujourd’hui encore toute leur drôlerie et leur pertinence comme critiques sociales de leur époque.
Parmi ces pièces, celles en un acte sont parfois de simples « levers de rideau ». À l’instar d’autres grands classiques de Marivaux, certaines d’entre elles n’ont pas connu un succès immédiat sur scène, mais si elles n’ont pas été longtemps représentées du vivant de Marivaux, l’auteur n’hésite pas à les présenter comme des sortes « d’essais » lorsqu’elles paraissent en livre.
- Les indispensables à lire en priorité :
La Surprise de l’amour, comédie d’amour en trois actes, 1722
La Double Inconstance, comédie d’amour en trois actes, 1723
La Fausse Suivante, comédie d’intrigue en trois actes, 1724
Le Prince travesti, comédie héroïque en trois actes, 1724
La Seconde Surprise de l’amour, comédie d’amour en trois actes, 1727
Le Jeu de l’amour et du hasard, comédie d’amour en trois actes, 1730
Le Triomphe de l’amour, comédie héroïque en trois actes, 1732
Les Serments indiscrets, comédie d’amour en cinq actes, 1732
L’Heureux Stratagème, comédie d’amour en trois actes, 1733
Le Petit-maître corrigé, comédie morale de mœurs en trois actes, 1734
La Mère confidente, drame bourgeois en trois actes, 1735
Les Fausses confidences, comédie d’amour en trois actes, 1737
Les Acteurs de bonne foi, comédie morale en forme de fantaisie exemplaire en un acte, 1748
- Les comédies à lire « pour aller plus loin », si l’on a aimé les chefs-d’œuvre :
L’Héritier de village, comédie morale de mœurs en un acte, 1725
L’École des mères, comédie morale de mœurs en un acte, 1732
La Méprise, comédie d’intrigue en un acte, 1734
Le Legs, comédie morale de caractère en un acte, 1736
La Joie imprévue, comédie d’intrigue en un acte, 1738
Les Sincères, comédie morale de caractère en un acte, 1739
L’Épreuve, comédie d’amour en un acte, 1740
Le Préjugé vaincu, comédie morale de caractère en un acte, 1746
- Les « autres » pièces de théâtre, pour les étudiants, les chercheurs, les enseignants, les inconditionnels du XVIIIe siècle et les complétistes :
Le Père prudent et équitable, comédie d’intrigue en un acte, 1712
Annibal, tragédie en vers et en cinq actes, 1720
Arlequin poli par l’amour, comédie d’amour en un acte, 1720
L’Amour et la Vérité, comédie morale allégorique en trois actes, 1720
Le Dénouement imprévu, comédie d’intrigue en un acte, 1724
L’Île des Esclaves, comédie morale sociale et philosophique en un acte, 1725
L’Île de la raison, comédie morale sociale et philosophique en trois actes, 1727
La Colonie, comédie morale sociale et philosophique en un acte, 1727
Le Triomphe de Plutus, comédie morale allégorique en un acte, 1728
La Réunion des Amours, comédie morale allégorique en un acte, 1731
Le Chemin de la fortune, comédie morale allégorique en un acte, 1734
La Dispute, comédie d’amour en un acte, 1744
La Provinciale, non attestée, son attribution faisant l’objet de nombreuses controverses, 1750
La Femme fidèle, drame bourgeois en un acte, 1755, texte partiellement perdu
Félicie, comédie morale allégorique en un acte, 1757
Bibliographie (très) sélective :
Charles-Marc Des Granges, Les Grands écrivains français des origines à nos jours, Librairie Hatier, 1900
Jean Fleury, Marivaux et le marivaudage, éditions Plon, 1881 (disponible sur Gallica)
Gustave Larroumet, Marivaux, sa vie et ses œuvres, éditions Hachette, 1882
Jean Fournier et Maurice Bastide, Théâtre complet de Marivaux, Les Éditions nationales, collection Les Classiques verts en deux tomes, 1946
Marcel Arland. Préface au Théâtre complet de Marivaux, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1950
Marek Ocenas, Le Théâtre de Marivaux, blog Théâtre and Co, 2020
Captations disponibles en DVD :
Une sélection de DVD encore facilement disponibles, neufs ou d’occasion.
Le Jeu de l’amour et du hasard, Comédie Française, 1976, mise en scène Jean-Paul Roussillon, avec Jacques Toja, Michel Etcheverry, Simon Eine, Jean-Noël Sissia, Patrice Kerbrat, Dominique Constanza et Béatrice Agenin. Éditions Montparnasse. La distribution parle d’elle-même. Indispensable.
Les Acteurs de bonne foi, Comédie Française, 1978, mise en scène Jean-Luc Boutté, avec Dominique Rozan, Alain Feydeau, Denise Gence, Yvonne Gaudeau, Richard Berry, Gérard Giroudon, Bérengère Dautun, Catherine Hiegel, Dominique Constanza et Bernadette Le Saché. Éditions Montparnasse. Une brochette d’acteurs parmi ceux qui ont écrit les plus belles pages de l’histoire du Français.
Le Triomphe de l’amour, Comédie Française, 1978, mise en scène Yves Gasc, avec Dominique Constanza, Yvonne Gaudeau, Michel Aumont et Gérard Giroudon. Éditions Montparnasse. Une distribution de rêve, une interprétation sublime datant d’un des âges d’or de la Comédie Française.
La Double inconstance, Comédie Française, 1982, mise en scène de Jean-Luc Boutté, avec Patrice Kerbrat, Françoise Seigner, Tania Torrens, Richard Fontana et Jean-Paul Moulinot. Éditions Montparnasse. Encore d’excellents acteurs et une interprétation classique, avec l’inoubliable Françoise Seigner.
Les Sincères et L’Épreuve, Théâtre 14, 2003, mise en scène Béatrice Agenin, avec Béatrice Agenin, Maxime Leroux, Geoffroy Thiebaut, Céline Clément, Arnaud Bédouet, Juliette Duval et Raphaëline Goupilleau. L’immense actrice de théâtre qu’est Béatrice Agenin a également effectué avec bonheur de nombreuses mises en scène. Avec ces deux comédies en un acte, elle retrouve ses premières amours puisqu’elle avait interprété Marivaux à plusieurs occasions avant même de rejoindre la Comédie Française en tant que sociétaire. Un régal.
La seconde surprise de l’amour, Théâtre des Amandiers à Nanterre et Théâtre Vidy à Lausanne, captation au Centre Dramatique National d’Angers Le Quai, 2007. Mise en scène Luc Bondy, avec Pascal Bongard, Audrey Bonnet, Clotilde Hesme, Roger Jendly, Roch Leibovici et Micha Lescot. Éditions Copat. Les décors (très sobres) et les costumes modernes ne trahissent à aucun moment l’esprit de cette comédie superbement interprétée.
Le Jeu de l’amour et du hasard, captation par la Télévision Suisse Romande, 2008, mise en scène Jean Liermier, avec Felipe Castro, Dominique Gubser, Joan Mompart, François Nadin, Alexandra Tiedemann et Alain Trétout. Éditions Copat. Costumes néo-classiques avec quelques impertinences et anachronismes volontaires, et décor d’une inventivité étonnante, digne des meilleures pièces d’Eugène Ionesco pour cette adaptation par un jeune metteur en scène de grand talent.
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Préférer la seconde mouture de l’édition Pléiade du théâtre, non seulement pour les commentaires et notices très abondants (400-500 pages par volume, soit un ratio considérable vu la finesse de ces derniers), mais encore et surtout pour la complétude du corpus. En effet, la comédie en un acte « La commère », l’une des productions scéniques les plus brillantes (et combien cruelle !) écrites par Marivaux, a été redécouverte postérieurement à l’édition Arland et publiée de façon princeps par son inventrice S. Chevalley en 1966, la rendant par là irrémédiablement obsolète. Moins riche de matière savante que Coulet/Gilot mais tout aussi sûre et occasionnellement meilleure (la répartition de l’intertexte érudit entre les notes et le commentaire y rend mieux service que leur mélange dans la seconde Pléiade), est l’édition Frédéric Deloffre aux Classiques Garnier, la première intégrale à donner La commentaire (1968, 2 vol. de 2279 p. au total, avec glossaire)..A Deloffre encore, qui doctora mémorablement sur « Marivaux et le marivaudage. Une préciosité nouvelle » (Les Belles Lettres, 1955 ; cette thèse eut l’insigne honneur de deux tirages mis en jour, en 1967 chez Colin puis en 1993 chez Slatkine), la Pléiade est redevable de sa splendide édition des Oeuvres de jeunesse (1972), dont l’unique faiblesse tient en une absurde décision gallimardesque à l’endroit de L’Iliade travestie (une moitié seulement du poème est reproduite dans ce volume, par économie comme l’écrit laconiquement un Deloffre dépité) ; aux Classiques Garnier, il a encore publié le Paysan parvenu avec introduction, notes et glossaire (1959, dernière mouture révisée et augmentée en 1989), sans compter diverses éditions commentées de telle ou telle pièce. Rappelons enfin que c’est au même Deloffre que nous devons l’adaptation Pléiade de la monumentale édition Besterman de la correspondance voltairienne, dont l’annotation fait souvent mieux que fournir la substantifique moelle du commentaire anglais (plus souvent généalogique ou prosopographique qu’explicatif) et que les spécialistes tiennent en haute estime.